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16 janvier 2008 3 16 /01 /janvier /2008 18:38

Où je reprends le même début de post que précédemment... : il est bien connu maintenant que sur les émissions humaines de CO2, les "puits" (la biosphère et l'océan) en absorbent aujourd'hui, de façon à peu près équivalente (un peu plus l'océan quand même) une bonne moitié. La question est bien entendu de savoir comment vont évoluer ces puits à l'avenir. En ce qui concerne le puits de la biosphère continentale (la végétation terrestre et les sols, grosso modo), une idée forte est que cette absorption pourrait venir à être limitée par la disponibilité en nutriments, et en particulier l'azote. En effet, bien que le CO2 soit évidemment un fertilisant "naturel" pour la végétation (well, la végétation en C3 surtout), il n'est pas le seul facteur limitant de la photosynthèse - outre les nutriments, celle-ci dépend évidemment beaucoup de la disponibilité en eau... Or cette limitation par l'azote et les autres nutriments n'est -évidemment - pas encore prise en compte dans les modèles globaux.
Hungate et al dans Science en 2003 montraient par exemple, par un petit "calcul de coin de table", que l'absorption de CO2 prévue au XXIè siècle dans les modèles du GIEC 2001 était stoechiométriquement (c'est-à-dire du point de vue du ratio C:N de la biosphère) incompatible avec le cycle de l'azote tel qu'il est connu aujourd'hui.
Par conséquent, la prise en compte de cette limitation azotée - c'est-à-dire concrètement le couplage, dans les modèles, du cycle du C avec le cycle du N - étaient devenue ces dernières années un des objectifs importants des biogéochimistes.
Et les premiers à dégainer un fully C/N coupled global model sont donc finalement - surprise ? - les américains du NCAR, avec un papier dans Global Biogeochemical Cycles le mois dernier.
Bon. Sans trop de surprise, on trouve bien que le puits de CO2 terrestre est réduit quand on couple C et N - de 75% dans leurs simulations sur le XXIè, mais je mettrai pas ma main à couper, ni même un ongle, sur ce chiffre...- et que d'autre part le couplage C/N attenue fortement la variabilité interannuelle (due au climat) de l'absorption de C par les écosystèmes. Moins d'absoprtion donc, moins variable.
Après leur tournée de séminaires en Europe cet automne, Thornton et al. vont certainement voir leurs résultats comparés et commentés, à d'autres modèles par d'autres équipes, dans d'autres papiers, dans les temps qui viennent (sur la brèche il y a essentiellement le Hadley et l'IPSL).
Ils ont un peu essuyé les plâtres, en qq sorte. Evidemment les incertitudes dans de tels travaux sont énormes (on a encore du mal sur le cycle du carbone seul, alors...), à la fois numériquement mais aussi au niveau des processus qui sont mal connus, et il se passera certainement du temps avant d'avoir une estimation robuste de l'impact de la limitation en N sur la biosphère terrestre. 
Mais déjà se dessine la prochaine fontière, le prochain horizon, celui du phosphore - dont il est admis qu'il est le facteur limitant de la productivité des forêts tropicales: voir par exemple cet article dans PNAS le mois dernier.

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commentaires

T
C'est toujours hallucinant de voir comment le climat est couplé a tout un tas d'autres trucs ... et à quel point notre connaissance sur le sujet est probablement incomplète. Dans tous les cas, on a l'impression qu'il y a une espèce de loi de Murphy en climatologie : quand un nouveau modèle est développé, il donne un réchauffement encore plus élevé !
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I
well, à mon avis il y a bcp trop d'incertitude dans ces nouvelles avancées (en biogéochimie)  pour accorder encore  trop de crédit aux résultats d'un seul modèle: il faudra nécessairement attendre d'avoir les sorties d'autres modèles pour avoir une idée de la robustesse et de la dispersion de ces résultats couplés C/N, au delà du quatlitatif... Soit dit en passant la grosse incertitude à mon avis est surtout toujours et encore dans le couplage avec le cycle de l'eau: on en parle plutôt pour l'aspect atmosphérique (on est censé avoir: plus chaud -> plus de vapeur d'eau-> plus d'effet de serre -> plus chaud, mais le grand débat est de savoir de combien - et ne parlons pas des nuages... ); mais au niveau de la biosphère ca compte évidemment bcp aussi: qu'on sache pas prédire le devenir des précipitations dans les Tropiques avec le RC pose évidemment pb pour estimer le devenir des stocks de C de la végétation tropicale, par exemple (étant donné l'imbrication des relations entre C, N, humidité des sols, etc...)....Toute la question est donc peut-être en fait de savoir jusqu'à quel niveau de réalisme -donc de couplage - les modèles doivent essayer d'aller, vu les échelles de temps qui nous intéressent.Sinon, l'autre jour j'ai vu une ligne de code qui trainait dans dans les routines de productivité végétale pour coder pour l'herbivorie des animaux ! vers un couplage avec la zoosphère ?